Il y a trois ans une bande d’amoureux du cinéma décide de lancer un site internet consacré au septième art, avec l’ambition de proposer des analyses de films approfondies et une vraie réflexion sur le cinéma d’aujourd’hui mais aussi de hier. Ainsi est né Sabzian. Le nom n’est pas anodin. Il fait hommage au très beau film “Close Up” d’Abbas Kiarostami (dont le personnage principal s’appelle justement Sabzian), film qui brouille toutes les frontières entre réalité et fiction, et qui mélange des scènes de cinéma-vérité et des séquences de pure mise en scène. La question de la mise en scène est d’ailleurs fondamentale pour la plupart des auteurs de Sabzian et est souvent au centre de leurs textes, qui peuvent prendre la forme d’interview ou d’essai. Les écrits sont généralement rédigés en néerlandais (la plupart des rédacteurs étant de la langue de Vondel), mais quelques fois aussi en anglais et en français. Depuis son lancement Sabzian organise une fois par an une soirée où il est possible de rencontrer tous les collaborateurs qui écrivent pour le site. Joyeux prétexte pour montrer aussi un film fétiche. Cette année-ci le choix s’est porté sur le splendide mélodrame “Les amants crucifiés” de Kenji Mizoguchi.
+ The Crucified Lovers [近松物語 [Chikamatsu Monogatari]]
Kenji Mizoguchi, 1954, 35mm, vo st ang, 110’
Kyoto, 17ème siècle, dynastie des Tokugawa. Osan est la femme d’un homme riche et avide, Ishun, grand imprimeur du Palais impérial. Il a comme assistant le jeune et talentueux Mohei, qui est secrètement amoureux de sa belle patronne. Suite à une incroyable série d’équivoques et malentendus, les deux sont injustement accusés d’être amants et sont obligés de s’enfuir pour échapper à un terrible châtiment… D’une beauté sobre, dense, avec des personnages étonnamment fouillés et complexes, “Les amants crucifiés” est un film sur la tragédie de l’amour sur fond de dénonciation d’une société japonaise conformiste et répressive. S’inspirant du théâtre kabuki, Mizoguchi réussit magistralement à dépeindre la sensation d’isolement et de refoulement des sentiments que vivent ses personnages. Un classique à revoir ou à découvrir à tout prix !
Lion d’argent à Venise en 1955