"En voiture Simone, c’est moi qui conduis, c’est toi qui klaxonnes !" L’équipe du PleinOPENair est heureuse de vous retrouver à la sortie des vacances, peut-être pour certains d’entre-vous après des heures d’embouteillages. Vous espériez en avoir fini, mais non, durant deux semaines, nous baladerons notre projecteur dans des lieux dédiés à la mythique "bagnole". Elle sera notre fil conducteur pour interroger les politiques urbaines qui, tout en voulant la planquer dans des parkings en sous-sol ou la dégager des centres-villes, continuent d’investir dans des infrastructures qui lui taillent la part belle. Alors qu’en 1958, on érigeait glorieusement un parking à étages, fruit de la modernité au cœur de la ville, 60 ans plus tard on le démolit. Mais les mêmes promoteurs convainquent nos élus que les parkings souterrains sont une solution au problème, alors qu’ils ne font qu’augmenter le trafic.
Depuis quelques générations, la passion pour la voiture a été bien façonnée, la voiture a été synonyme de liberté, de mécanique virile, de forme féminine, d’objet de séduction et d’émancipation, de prouesse technologique et d’illustration du progrès. Toujours plus rapide, plus fiable, plus puissante, plus confortable. Aujourd’hui, on nous la vante silencieuse, économique, écologique et intelligente. Ces boniments fonctionnent, au vu des embouteillages qui se forment vers le Salon de l’auto.
Quelque chose ne tourne plus rond dans le moteur de Bruxelles. Depuis les années 1960, la ville est de plus en plus grise de congestion, les indicateurs de pollution de l’air sont dépassés, les habitants crachent leurs poumons, la liberté via la cabriolet décapotable fait illusion. Nous voilà nantis d’un étrange héritage, mal entretenu qui plus est, vu les viaducs et autres tunnels qui se fissurent de partout, et pourtant nous réclamons toujours plus de parkings et passons nos vies à travailler pour accéder à cet objet de convoitise qui plombe notre air et nos finances. Nous nageons en pleine schizophrénie : les piétonniers se démultiplient en surface mais nos sols sont creusés pour accueillir toujours plus de voitures ou encore un métro très coûteux qui laissera la place aux bagnoles en surface.
Nous allons entamer notre petite exploration automobile entre forêt et bitume : sous le viaduc Hermann-Debroux, ce vestige du "tout-à-la-voiture" qui vit ses dernières années. Lors de sa construction, il structurait une vision politique de la ville, une entrée importante de Bruxelles qui doit maintenant se réinventer. Un Plan d’Aménagement Directeur est à l’étude. Espérons que sa reconversion portera un projet de mobilité pour les citadins qui nous succéderont.
Le week-end suivant, nous irons là où une partie des voitures usagées transite vers une seconde vie en Afrique : dans le quartier Heyvaert, et plus précisément sous la halle Libelco, qui pour la dernière année accueille les voitures destinées à l’exportation. La voiture et ce quartier sont intimement liés à des chassés-croisés tissant des parcours de vies. Mais l’exportation de voitures dans un quartier central ne fait pas bonne figure et les nouveaux défis régionaux poussent l’activité et ceux qui en dépendent en bordure de la ville. La mondialisation par le bas ne semble pas récolter les mêmes succès auprès des décideurs que la mondialisation par le haut. Habitants et voitures de "seconde" classe sont priés d’aller voir ailleurs.
Cette année, entre un viaduc et une halle, le PleinOpenAir prendra la forme d’un drive-in sans autos et nous n’aurons donc pas à craindre la pluie. Mais ce PleinOPENair a bien failli ne pas voir le jour : notre belle énergie fut mise à rude épreuve avec les mesures de sécurité qui se durcissent ainsi qu’avec une commune particulièrement tâtillonne en cette période pré-électorale. Le programme que vous tenez entre les mains sort après avoir obtenu de justesse deux des trois autorisations pour aller installer notre toile sur les sites que nous voulions visiter. Quant au troisième, ce n’est pas en voiture, mais en bateau que la Commune de Schaerbeek nous a menés, rendant impossible la programmation que nous avions conçue pour la place Lehon, là où elle voulait jusqu’il y a peu creuser un parking souterrain. Profitons donc de cette occupation de l’espace public de plus en plus difficile à obtenir. Pour cette fin d’été, levez le pied, décélérez et venez nous rejoindre au PleinOPENair !